Le Temple de Medamoud
Situé à 4 km au nord-est de Karnak, le village moderne de Medamoud est en partie implanté sur les strates successives (kôms) de l’antique cité de Madu, accumulées au cours des siècles. Le site Fouillé par Fernand Bisson de La Roque de 1925 à l'après-guerre, révéla de nombreuses constructions et un temple de briques crues. Ce temple, daté de Sésostris III, était dédié à l'ancien dieu de la guerre à tête de taureau Montou. Ce temple remplaça un ancien sanctuaire primitif remontant à l'Ancien Empire. Après une interruption de près de 30 ans, les fouilles ont repris en 2011.
Le Dieu Montou
Montou est originellement un dieu solaire, a Thèbes il s'incarne dans un faucon, il incarne également la force guerrière qui en fait un dieu-taureau. En tant que dieu guerrier il protège le quatrième nome de Haute Égypte (province thébaine) ou quatre sanctuaires de culte lui sont dédiés. Dans les sanctuaires d'Hermonthis et de Medamoud, le culte lui était rendu sa forme de taureau sacré Boukhis. Le Taureau vénérable, cet animal divin a acquis avec les premiers Ptolémées une importance considérable puisque le temple est à son nom. Aussi bien Amon que Montou peuvent se manifester sous cette forme sacrée. Après la fin de la Première Période intermédiaire, les rois de la XIème dynastie portent Montou au rang de dieu dynastique et forment leur nom de « fils de Rê » sur le sien : les Montouhotep. Des temples lui sont élevés non seulement à Thèbes, la nouvelle capitale du pays, mais dans les villes voisines d'Armant, Tod et Medamoud. Ils forment un complexe monumental sacré défendant la ville d’Amon, complexe ultérieurement appelé palladium de Thèbes par les Grecs.
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Dès cette époque, il règne sur ces quatre cités, ainsi que le démontrent ses épithètes. Dès cette époque, le dieu quoique hiéracocéphale (humain à tête de faucon) est qualifié de « taureau qui descend de Tod »* ou de « taureau qui réside à Tod ».
Sous le règne d'Amenemhat Ier (XIIe dynastie), Montou s'appelle « le taureau d'Armant qui sort de Tod » ; sous celui de Sésostris III, il est « le taureau qui réside à Medamoud ». A partir du Moyen Empire, l'animal sacré de Montou est donc un taureau, qui se manifeste d'abord à Tod, puis à Armant avant d'être associé à Thèbes et Medamoud. C'est en fouillant les fondations de l’arrière-temple gréco-romain de Montou à Medamoud que F. Bisson de La Roque découvrit les restes de huit statues en calcaire doré. Quatre d'entre elles représentaient le dieu Montou bucéphale. Les quatre autres étaient des effigies de sa parèdre, la déesse Rattaouy. Chacun des quatre couples était attaché respectivement à l'une des quatre villes de Montou : Tod, Armant, Thèbes et Medamoud.
Il est connu depuis le Moyen Empire et fait partie a l’époque ptolémaïque et romaine du « palladium de Thèbes » un quadrilatère de protection de Thèbes, formé par les temples de Montou de Karnak-Nord, de Medamoud, de Tod, tous les trois sur la rive droite, et celui d’Ermant sur la rive gauche au sud de Medinet Habou. L’édifice a subi de nombreux remaniements depuis le Moyen Empire, au Nouvel Empire et surtout à l’époque ptolémaïque puis romaine, lorsqu’il a été considérablement agrandi, tout en conservant des éléments témoins des époques plus anciennes.
Le Temple du Moyen Empire. Orienté est-ouest, il a été largement modifié à l’époque tardive. Le temple et ses dépendances était entouré par un mur d’enceinte de 200 sur 180 mètres, orienté nord-sud dont les principaux accès se faisaient par l'est et le nord, ou se trouvait la porte monumentale dite de Tibère. Une vaste cour fut décorée sous Antonin devant le temple proprement dit. À l’arrière et à l’ouest, est accolée une seconde construction dont il est fort difficile d’interpréter les restes, tant ils sont ruinés. Son mur extérieur décoré sous Domitien et Trajan porte une double procession géographique qui met face à face « le très grand taureau vénérable qui réside à Medamoud » et « Montou-Rê, seigneur de Thèbes, taureau qui réside à Medamoud ».
Il était composé d'une première enceinte de 200 sur 180 mètres, orientée nord-sud dont les principaux accès se faisaient par l'est et le nord, qui enfermait le temple proprement dit et ses dépendances. Un lac sacré se trouvait probablement sur le côté ouest du temple qui reprenait l'orientation de l'enceinte. L'ensemble était composé de deux parties distinctes que l'on a interprétées comme étant au nord le temple, et au sud le quartier des prêtres avec ses magasins, son grenier gardé dans sa propre enceinte, et ses six maisons de prêtres. Ces deux parties étaient indépendantes bien que contigües et ne pouvaient communiquer entre elles que par l'extérieur.La place du taureau se compose de trois pièces allongées adossées à un escalier qui devait mener sur le toit de l'édifice. Dans l'axe de la pièce centrale, subsistait la porte monumentale de Sésostris III dans sa situation initiale donnant accès à une salle ou une cour en rapport avec les cérémonies oraculaires évoquées par le bas-relief de l'oracle du taureau disposé, sur le mur extérieur sud, dans l'alignement de la porte de Sésostris III.
D’après le plan original de E. Laroze (IFAO)
Dans son état actuel le temple remonte à la période ptolémaïque et a continué à être agrandi et décoré sous les empereurs romains. On peut relever les cartouches de nombreux empereurs dont notamment ceux de Tibère.
Un canal reliait le temple de Medamoud au temple de Montou de Karnak. Sur son quai, on peut encore trouver des graffitis en démotique, des dédicaces ou encore empreintes de pieds gravées. Il était précédé par un dromos de sphinx assez ruiné aujourd'hui. En suivant cette allée processionnelle on franchissait l'enceinte ptolémaïque par la porte monumentale de Tibère et dont il ne reste que les montants latéraux.
Dans l'axe de la porte de Tibère on trouve le pylône d'entrée du temple édifié par Ptolémée VIII Evergète II. Il le fit précéder de trois kiosques reposoirs destinés à abriter les barques divines et leurs porteurs lors de leurs sorties rituelles. Sa décoration s'acheva sous Ptolémée XII.
Suivait une grande cour bordée de portiques sur trois côtés et dans laquelle se trouvait un autel pour les sacrifices rituels. La décoration de cette cour prit fin sous L’empereur romain Antonin le Pieux dont on a pu relever les cartouches sur les bases de colonnes.
L’Empereur Vespasien fait l'offrande de Maât à Amon (origine, cour d'Antonin de Pieux.)
Composée de douze colonnes, elle fut érigée toujours sous Ptolémée VIII qui fut donc l'un des grands reconstructeurs de Medamoud. Quatre des six colonnes de la façade sont encore reliées entre elles par des murs bahuts nous donnant une idée de l'élévation de l'ensemble du temple. Dès début de l'époque ptolémaïque le sanctuaire de autour du naos du Nouvel Empire fut remanier et i ne cessera d'être embelli pendant près de 500 ans par les souverains lagides puis romains. Enfin suit, toute une série de chapelles destinées au culte du dieu local qui formaient le temple proprement dit avec sa salle de la barque et son naos, ainsi qu'un sécos où vivait le taureau Boukhis incarnation vivante, mais tardive du dieu Montou. Cette section du temple comprenait une succession de cours, parfois à colonnade, dont une possédait un bassin ou un abreuvoir destiné sans doute au taureau sacré.
Le temple de Montou et de Medamoud nous permet de comprendre le fonctionnement des cultes des taureaux. Le temple de Medamoud pourrait être le lieu où était révélé et vivait le dieu Montou sous sa forme de taureau sacré tandis que celui d'Erment serait le temple consacré à sa mort, une nécropole des taureaux sacrés y a été découverte à proximité que l'on nomme la Bouchéum.
On notera notamment une procession de chanteurs et musiciens s'avançant religieusement vers le dais qui abritait l'animal sacré devant lequel Trajan (98 à 117) en costume traditionnel du pharaon consacre une offrande.
Les découvertes En 1931, des blocs provenant du premier temple des Ptolémées furent donnés au Musée des Beaux-Arts de Lyon; assemblés, ils constituent deux portes, l'une de Ptolémée III et l'autre de Ptolémée IV (-222 à -205) Porte de Ptolémée ΙII Sa décoration décrit les scènes traditionnelles de la fête Sed. On peut voir le roi en costume traditionnel recevoir les offrandes, accomplissant la course rituelle, étape importante de cette cérémonie de la régénération du pouvoir royal. Les scènes sont classiques, disposées en trois registres. Ce sont des offrandes d'aliments, de lait, de vin, de bière, la présentation de Maat, des sistres et du symbole ouncheb le don des laitues à AmonKamoutef, la consécration du pain blanc... .LA FAÇADE : Le décor symétrique montre Ptolémée IV en tant que roi de Haute Egypte (montant droit) et de Basse-Egypte (montant gauche) se dirigeant vers l’intérieur du temple à la rencontre d’Amon et de Montou. Sur Le montant gauche, autrefois surmonté de la déesse Ouadjet, et coiffé de La couronne rouge, il officie pour la Basse-Egypte. Sur Le montant droit, surmonté de la déesse-vautour Nekhbet, coiffé de La couronne blanche il officie pour de la Haute-Egypte. Vêtu du pagne de cérémonie à queue de taureau, insigne du pouvoir royal, Ptolémée IV tient la massue et la canne d’apparat. il s’avance vers l’intérieur de la porte à la rencontre de la forme locale du dieu Montou « le Taureau très grand et vénérable ». LE PASSAGE : Il est décoré de deux frises alternées de signes monumentaux symbolisant la Longévité du règne. Dans la première LE REVERS : Comme pour la façade un décor symétrique montre Ptolémée IV accueilli dans Le temple par Les dieux. Sur le montant droit coiffé du pschent, il reçoit d'Amon le khépesh dont la lame a disparu, (cimeterre à tête de bélier, symbole de La victoire) et L'étui-mekes (censé contenir un décret divin rédigé par Thot). symboLe de la transmission du pouvoir divin. Sur Le montant gauche disparu, Le pharaon devait être accueilli par Montou Les cartouches du roi Ptolémée IV encadrés par deux uraeus coiffés de hautes plumes sont séparés par des génies accroupis sur des corbeilles. Ils tiennent dans chaque main une grenouille, symbolisant Les millions d'années, à laquelle est accrochée une corbeille de fête-Sed, promesse de nombreux jubilés. Dans la seconde,
un signe de vie (ankh) muni de bras et posé sur une corbeille, tient de chaque côté un sceptre-ouas, symbole de pouvoir et de domination.
Linteau
Ce linteau fut découvert par F. Bisson de la Roque en 1927, Il gisait à plat, face contre le sol, préservant ainsi son bas-relief en creux. Entré au musée du Louvre en 1930, il représente une scène complète de l'offrande d'un roi à un dieu.
Représenté deux fois de façon symétrique, Sésostris III, vêtu du pagne chendjit, présente une offrande à Montou, maître de Thèbes., à gauche c’est un petit pain blanc conique, Consacrer un pain blanc à droite un gâteau Offrir le "shât". Au-dessus de lui il est protégé par les ailes du disque solaire représentant Horus. On remarquera qu'à gauche, le roi présente un faciès lisse, volontairement juvénile alors qu'à droite, il semble bien plus âgé. Le roi semble représenté à deux âges différents , peut-être une allusion à la nature solaire du souverain.
Montou est représenté avec une tête de faucon couronnée de deux plumes droites ornées du double uraeus ; il est vêtu d'un pagne plissé muni d'une queue de taureau, il tient le sceptre ouas (le pouvoir) et le signe ankh (la vie). Les positions respectives du dieu et du roi sont inversées, Habituellement, le dieu est situé au fond du temple et le roi se dirige vers lui venant de l'extérieur, ici c’est l’inverse.
Diaporama
Bibliographie
Institut français d’archéologie orientale - IFAO Le temple de Medamoud
http://www.ifao.egnet.net/archeologie/medamoud/
Jean Sainte-Fare Garnot Le temple primitif de Medamoud
Chantal. Sambin, « Les portes de Medamoud au musée de Lyon », BIFAO 1992
Musée des beaux-arts de lyon
http://www.mba-lyon.fr/mba/sections/fr/collections-musee/antiquites/departement3191
Conférence de Christiane Zivie-Coche 2012
Jean Claude Golvin
Kairoinfo 4u https://www.flickr.com/photos/manna4u/albums/72157663940738801