La fête du Nouvel An
(Au temple d’Edfou)
Elle fait partie des fêtes annuelles. Les prêtres lettrés qui choisirent, entre tant de fêtes annuelles, quatre festivités d'Horus pour en montrer le déroulement sur les murs de leur temple, ne le firent pas au hasard. Ces choix furent faits à des époques successives, selon le degré d'avancement de la reconstruction. Le premier s'imposait. Il s'agit d'un genre de fêtes à procession tout spécial, qui, au rebours de tous les autres, se déroulait entièrement à l'intérieur de la maison divine, à portes fermées. Son importance dans le culte et sa fréquence au cours de l'année s'étaient largement développées, depuis l'époque saïte. La fête du Siège et la fête du nouvel an furent les premières a être représentées sur les murailles mêmes construites à leurs usages. Voici les parties successives du temple d'Edfou qui servaient au parcours de la fête du nouvel an :
1° Une profonde cour intérieure ménagée dans la partie orientale du temple, à l'est du sanctuaire et de la salle de l'ennéade. Cette cour débouche à ciel ouvert sur la terrasse du temple, où une murette, disparue aujourd'hui, formait parapet. On entre dans cette cour par une porte ménagée entre elle et la salle de l'ennéade.
2° Une chapelle-reposoir (l’Oubaet), bâtie dans la moitié nord de cette cour. Elle est tournée vers le sud, et surélevée de six marches au-dessus du niveau de la cour. Deux colonnes encadrées par des murs d'écran à mi-hauteur, soutiennent son architrave, sa corniche, et son plafond à la hauteur du dallage de la terrasse1.
3° Un escalier montant à rampes droites, tournant autour d'un massif central rectangulaire. Cet escalier est bâti à l'est de la salle de l'autel. L'une de ses deux entrées inférieures vient de cette salle l'autre, de la salle hypostyle du temple. Il prend jour par cinq soupiraux taillés dans la pierre du mur extérieur oriental du temple, et débouche sur la terrasse.
4° Un chemin de ronde pour les processions sur la terrasse, protégé des vues venant du dehors par le haut du mur extérieur du temple, et se dirigeant vers le nord.
5° Dans l'angle nord-est de la terrasse, le chemin de ronde traversait une chapelle-reposoir bâtie en pierre sur plan rectangulaire. De petites colonnes reliées à mi-hauteur par des écrans soutenaient les architraves. Au-dessus, une voûte en bois stuqué et peint fermait l'édifice. Deux portes permettaient, l'une d'entrer et de déposer les images divines, l'autre de repartir en continuant le chemin de procession.
6° Le chemin de ronde au sortir de la chapelle se dirige vers l'ouest, et aboutit, dans l'angle nord-ouest, à la partie supérieure de l'escalier descendant. La tête d'escalier, formant cage de pierre au-dessus du dallage de la terrasse, est aujourd'hui
7° Un escalier droit à une seule rampe. Il descend de la terrasse jusqu'au niveau du dallage des salles du temple, allant du nord vers le sud. Encastré entre le mur extérieur occidental de la maison divine et le mur de fond des chapelles qui entourent le sanctuaire, il débouche, en arrivant au sol dans l'angle d'une salle spéciale construite à l'ouest de la salle de l'autel.
8° Une salle, aux murs revêtus d'une décoration appropriée à son rôle dans le symbolisme de la fête processionnelle. De là, on revient à la salle de l'autel, sur l'axe central du temple.
Tel est le dispositif architectural construit pour les fêtes du Siège de la première fête. De plus, les statues d'Horus et d'Hathor prenant part à ces fêtes sont celles du petit sanctuaire Mesen, situé derrière le grand sanctuaire central. La procession qui les emporte se forme en deux colonnes empruntant à la fois les deux branches du couloir circulaire autour de ce sanctuaire central. Toute la disposition intérieure du temple d'Edfou a donc été conçue pour donner aux processions qui ne sortaient pas du temple les plus grandes commodités.
A partir du « Jour de l'an », le cérémonial de la procession changeait, et son itinéraire prenait toute son ampleur. On procédait d'abord à l'habillement, au même lieu qu'en temps de fin d'année.
Tous les tissus qui voilaient les idoles, tous les parfums qui servaient à les imprégner, devaient être renouvelés et consacrés à neuf. Les images des rois divinisés étaient vêtues et parées en même temps que celles des dieux. Un hymne marquait la fin de l'office de la parure. Un autre donnait le signal du départ de la procession.
On repartait vers l'escalier de la terrasse. Un magnifique ensemble décoratif permet d'assister, au temple d'Edfou, à la montée du cortège. Il est gravé sur les deux parois à droite et à gauche de l'escalier de la terrasse, et comprend scènes figurées et commentaires.
Aux deux hymnes au Soleil levant gravés dans la cour succédaient trois autres cantiques, qu'on chantait en montant lentement les marches. Le cortège débouchait sur la terrasse, et déposait ses tabernacles dans le « kiosque » de pierre, la face tournée vers le sud. Les porteurs de l'offrande suivaient alors, et groupaient leurs fardeaux sur les dalles, en avant du reposoir. Alors seulement on purifiait l'offrande, on la consacrait, au moment où l'âme des dieux se joignait à leur corps, par le toucher du soleil. Un somptueux repas divin suivait, avec des holocaustes en plein air sur les autels à feu. Une exposition de la face divine au seuil du reposoir, sur la terrasse close par son mur de garde, terminait cette longue halte, devant les assistants prosternés. C'était ensuite la descente, par la longue rampe de l'escalier ouest, des dieux « renouvelés » vers la terre des vivants.
Munis à ce moment d'un surcroît de puissance, ils traversent, en bas, la « chapelle des grands dieux ». Son décor, où tout rappelle et suscite la création des biens terrestres, fait comprendre ce qu'on attendait des bénédictions divines, au bout des rites du Nouvel an. Une année de fertilité et de fécondité nouvelles y prenait sa source, pour la végétation, les animaux et les hommes.
Le peuple de la province n'était pas convié à ces grands offices dans le temple clos, mais ses dîmes fournissaient matière à leurs offrandes. Il en attendait avec confiance ses moissons futures, car le bon ordre était assuré sur la terre, quand la puissance des rites le renouvelait chaque année au ciel.
BIBLIOGRAPHIE
Alliot, Maurice Le culte d'Horus à Edfou au temps des Ptolémées (1949)
Alliot, Maurice Le culte d'Horus à Edfou au temps des Ptolémées (1954)
Coppens Filip Temple Festivals of the Ptolemaic and Roman Periods 2009,