EDFOU
OU LA TOUTE PUISSANCE D'HORUS
En raison de son prodigieux état de conservation, Edfou est le temple par excellence. Est-ce un hasard si son protecteur, Horus , qui est aussi celui de Pharaon, a veillé avec tant de soin sur cet édifice qu'il nous est parvenu intact. Capitale du deuxième nome de la Haute Égypte, Edfou fut ville importante et riche dès l'Ancien Empire. Elle était le siège d'Horus symbolisé par un disque solaire ailé, autrement dit la lumière en mouvement. Connu en ces lieux sous le nom d'Horus de Behedet, le dieu est également faucon ou homme à tête de faucon.
L'impression offerte par Edfou est tout simplement extraordinaire. On est persuadé qu'il ne manque pas une pierre, pas une sculpture, pas un relief. Sans nul doute, Edfou est un miracle. Sa préservation est due à la magie d'Horus qui a veillé sur son temple d'élection. Les rationalistes ont un autre avis. Pour eux, tout s'explique par une longue période d'ensablement, pendant laquelle seules les parties hautes de l'édifice restaient visibles.
Les membres de l'expédition d'Égypte, en 1798, constatèrent que des fellahs avaient construit leurs demeures autour du temple et même sur le toit ! Edfou était alors une sorte de forteresse permettant de s'abriter lors des raids des pillards du désert. Et ce n'est qu'en 1860 que le FrançaisMariette commença à désensabler Edfou dont la grande salle à colonnes avait été comblée jusqu'à la hauteur des chapiteaux. Un autre Français,Chassinat, s'attela à une autre tâche, beaucoup plus gigantesque : copier les longs textes qui ne rempliront pas moins de 15 volumes in-folio dont la plupart, hélas ! attendent toujours une traduction. Edfou est le temple parfait, le temple symbole dans toute sa pureté. Il nous mène de la lumière du monde extérieur au secret du Saint des saints à travers une succession de salles.
(Aquarelles de David Roberts )
Le grand temple, est pratiquement intact, à l'exception de quelques dégradations dans les corniches. Il lui manque deux obélisques précédant l'entrée et les grands mâts à banderoles ornant la façade. Par ses dimensions (137 m de long, 80 m de large) Edfou est le plus grand temple d'Égypte après Karnak Ce sanctuaire était le centre d'un ensemble sacré dont les autres éléments (les magasins, les logements des prêtres, les ateliers) ont disparu ou sont mal conservés. De tout temps, le site d'Edfou fut consacré au faucon d'Horus. C'est là que le rapace, symbole du dieu, venait se poser. C'est là qu'il avait établi son aire sur la terre d'hommes. L'édifice actuel est donc le dernier et le plus vaste d'une série de monuments élevés à la gloire du dieu. La pose de la première pierre eut lieu le 23 août 237 avant J.-C., sous le règne dePtolémée III Evergète, la Construction s'achevant en 57 av. J.-C.
Pendant deux siècles, Edfou fut le plus grand chantier d'Égypte, affirmant la pérennité d'Horus, dieu national, à l'époque où I'Égypte n'était plus une grande puissance. Si l'on connaît ces dates, on connaît également le nom de l'architecte: un certain Imhotep dont le nom rappelle étrangement celui du sage Imhotep, créateur de la pyramide à degrés de Saqqarah ! Comment mieux exprimer que c'est le grand ancêtre, le patron de tous les Maîtres d'Œuvre, qui présida à l'élaboration du plus parfait des temples ? " Je tiens le coin de bois et le manche de la canne du sceptre", dit le roi Maître d'Œuvre, lors de la cérémonie de fondation. "Je tiens le fil avec la déesse Séchât , mon regard suit le cours des étoiles mon œil observe la polaire, j'ai établi les quatre angles du temple" Comme toujours, la construction débuta par le Saint des saints, c'est-à-dire par l'essentiel.
Les Maîtres d'Œuvre du Moyen Age conserveront cette tradition lors de la construction des cathédrales. Quant aux sculpteurs chargés d'illustrer les parois par les scènes rituelles, ils suivirent un manuel très précis dont les éléments sont connus. L'artisan égyptien, qui ne se considéra jamais comme un artiste libre de faire ce que bon lui semblait, était un authentique créateur parce qu'il respectait l'harmonie divine.
L'inauguration donna lieu à l'une des plus formidable fêtes jamais célébrées sur le sol d'Égypte. Les cœurs étaient en joie. La population entière fut associée à ce formidable événement. On ne lésina ni sur la nourriture ni sur la boisson. On revêtit des habits somptueux de lin blanc. Bœuf, oryx, gazelle, vins de qualité étaient au menu. Dans la cité fleurie flottaient des odeurs de parfums précieux, encens ou oliban. Les jeunes femmes étaient belles, personne n'avait envie de dormir. Toute la nuit, on fêta Horus et son temple. Horus de Behedetest le dieu céleste par excellence.
C'est un immense oiseau dont les ailes ont l'envergure du cosmos. Il se percha sur un roseau, dans l'Océan primordial, à l'origine des temps. De son regard, il créa le monde. Prenant son envol, il survola la terre et, soudain, s'arrêta dans le ciel. Il venait de reconnaître l'endroit où il voulait que son temple fût édifié : Edfou, qui devint le « perchoir d Horus ». Les Égyptiens aimant concrétiser le symbole jusqu'à ses aspects les plus matériels, il existait à Edfou un collège de spécialistes de l'élevage des faucons. Chaque année, un des rapaces était choisi pour devenir l'incarnation vivante du dieu Horus. On l'introduisait rituellement dans sa fonction lors d'une fête spéciale et on montrait, du haut du pylône, le faucon choisi par le dieu pour le représenter. Tel qu'il se présente, Edfou nous permet de comprendre la structure d'un temple égyptien complet dans toutes ses parties. Elle incarne le parcours d'un initié qui part de la porte monumentale d'accès, le pylône, traverse une cour à ciel ouvert, entre dans une salle à colonnes, passe par une seconde salle et progresse dans le temple fermé dont le cœur est le Saint des saints, temple à l'intérieur du temple entouré d'une sorte de déambulatoire et de chapelles.
BIBLIOGRAPHIE
Gérard Ducher Guide de voyage en Égypte 2002
Charron Alain Le Faucon d’Edfou 2009
Michel Siland La toute puissance d'Horus
Lithographies David Roberts